Mon organisation est un produit #2

Comment animer et guider une feature factory à une organisation produit.
Date de publication
3/12/2023
17/4/2024
Mon organisation est un produit #2

Alors on s’y prend comment ? Cet article fait suite à cette première partie

Avec une vision claire

a. Clarifier la vision stratégique de l’organisation ou du cadre de travail

Mon expérience m’a permis d’animer de nombreux types d’organisation et leur transformation. Que ce soit des équipes Scrum, une agence web ou des organisations à l’échelle, j’ai toujours gardé une vision à l’esprit, un idéal qui apporte une réponse à une problématique.

En tant que responsable d’une agence web, j’avais pour mission avec mon équipe de créer des applications en nous appuyant sur des cahiers des charges précis. Cependant, je savais que la clé du succès résidait dans la satisfaction des utilisateurs finaux des produits décrits dans ces documents.
Ainsi, notre agence devait adopter une culture agile tout en respectant les contraintes contractuelles, un savoir-faire qui a émergé de nos diverses expériences.
Ce qui pour une agence, il y a 15 ans, n’était pas une évidence…

Comme le décrit Pablo Pernot dans son article “Arrêtons avec la tyrannie de la vision”,

une vision devrait être
. une direction (porter du sens)
. assez simple et claire pour se l’approprier
. désirée et donc vécue, incarnée.
. elle peut émerger, changer, s’adapter, évoluer
et une vision n’a pas à être
. une esclavagiste
. détaillée
. nécessairement grandiloquente (pas la peine de sauver le monde tous les matins).
. définitive

Dans le secteur des produits numériques (google, Blablacar…), la vision de l’organisation peut se résumer à :
“Innover et impacter positivement la vie de millions d’utilisateurs en créant des solutions numériques exceptionnelles, intuitives et durables, qui répondent aux besoins et défis de notre époque, tout en favorisant la croissance et l’épanouissement de notre équipe et en contribuant au développement durable de notre société.”

Bien sûr, il s’agit d’une proposition assez générique.

Pour utiliser une image, la vision ressemble à une direction que l’on peut utiliser comme boussole, mais elle ne peut décrire le voyage pour l’atteindre. Il y a beaucoup trop de facteurs en jeu pour se fixer une autoroute.

b. Établir la promesse en tant résultat attendu pour les parties prenantes de l’organisation

Cette vision doit être un résultat attendu (outcome) et non sa solution (output). C’est bien la promesse d’une future organisation qui doit motiver son évolution, et non le dogme d’une solution déjà décrite.

Lorsque Toyota imaginait son avenir organisationnel, ils ne se sont pas dit qu’ils allaient inventer le lean management (TPS). Par contre, ils étaient nécessairement convaincus qu’ils devaient créer une organisation luttant contre le gaspillage et centrée sur la création de valeur.

c. Communiquer et partager la vision

Il est fondamental de partager une vision claire et inspirante avec l’ensemble des , créant ainsi un désir profond et une motivation pour atteindre les objectifs fixés. Cette vision doit être facilement compréhensible et applicable au quotidien, permettant à chacun de saisir l’impact de ses actions individuelles sur les objectifs organisationnels. En communiquant régulièrement et avec passion cette vision, vous maintenez l’engagement et l’enthousiasme des parties prenantes, alimentant leur motivation à persévérer vers l’atteinte des buts définis.

Les principes clés pour faire de votre organisation un avantage stratégique

Alors maintenant que l’analogie devient plus claire, la démarche pour mettre en œuvre une organisation et sa transformation prend forme telle une démarche Agile.

Pour atteindre la vision souhaitée, je vous propose quelques principes importants du product management afin d’élaborer notre organisation.

  1. Centré sur l’utilisateur : Placer les besoins et les attentes des collaborateurs et des clients finaux au cœur de la conception de l’organisation. En comprenant et en répondant à leurs besoins, elle sera plus efficace et offrira une meilleure expérience à ses parties prenantes.
  2. Approche itérative : Adopter une approche itérative pour adapter et améliorer continuellement les processus et les méthodes de travail. Cela permettra à l’organisation de rester agile et de répondre rapidement aux changements dans son environnement.
  3. Un cadre structuré : Mettre en place un cadre clair qui définit les rôles, les responsabilités, ainsi que les rituels nécessaires pour soutenir et guider l’évolution de l’organisation. Ce cadre doit inclure un propriétaire (owner) responsable de la mise en œuvre et de l’amélioration continue de l’organisation.
  4. Feedback : Recueillir et intégrer régulièrement les retours d’expérience des parties prenantes pour améliorer l’organisation. Ce processus d’apprentissage continu permet de mieux comprendre les forces et les faiblesses de l’organisation et d’identifier les domaines d’amélioration.
  5. Planification flexible : Établir un plan qui n’est pas rigide comme une autoroute, mais qui met en évidence à la fois les objectifs à court terme et à long terme. Cette approche permettra à l’organisation de rester adaptable face aux changements et aux défis imprévus, tout en gardant une direction claire et cohérente.

Bien sûr, cette liste de principes n’est pas exhaustive et leur application dépendra du contexte spécifique de chaque organisation. Néanmoins, ces principes fournissent un excellent point de départ pour façonner et transformer votre organisation en accord avec la vision souhaitée.

Et concrètement ?

Animation des évolutions

Sans être exhaustive et surtout dogmatique, cette partie propose des solutions de management afin de concrétiser la démarche. Comme souvent, un objectif ou un résultat attendu (outcome) peut avoir plusieurs solutions.

Mais par où commencer? En réalité, c’est assez simple. Puisque nous nous inspirons d’une démarche produit pour manager une transformation organisationnelle, autant utiliser les outils à notre disposition. Pour initialiser sa démarche, il est pertinent de s’intéresser aux cadres de travail (framework) qui ont fait leurs preuves, tels que Scrum et Kanban, qui sont des approches agiles pour organiser et gérer des projets. Bien sûr, les durées (timebox) ne sont pas les mêmes, mais pour cette première étape, c’est déjà puissant.

En appliquant ce modèle, vous piloterez efficacement et simplement vos évolutions :

Nous pourrions décrire cette démarche sous forme d’une belle histoire :

Des utilisateurs et leurs besoins sont identifiés, conduisant à une vision claire pour l’organisation. Une roadmap de transformation est élaborée, avec un backlog d’actions prêtes à être déployées en sprints. Au fur et à mesure, des retours sont recueillis pour améliorer l’avancée et ajuster la stratégie, guidant ainsi l’organisation vers un futur prometteur.

Retour utilisateur et indicateurs de succès

En ce qui concerne les retours des utilisateurs, nous pouvons nous appuyer sur les rétrospectives d’équipe. Ces rétrospectives représentent une source d’information précieuse. L’équipe responsable de la transformation organisationnelle organise généralement ces rétrospectives et a accès aux commentaires des utilisateurs de leur organisation. Collecter ces informations nous permet de mesurer l’efficacité du cadre organisationnel et d’identifier ses axes d’amélioration.

Dans notre dispositif dédié à l’animation du cadre organisationnel inspiré des méthodes Agile, nous introduisons un autre rituel important : la démonstration. Son objectif est de présenter les progrès réalisés dans l’évolution de notre organisation, les retours des utilisateurs et ainsi le statut général lié à notre feuille de route. Ce rituel offre l’occasion à la direction et aux managers d’apporter leurs propres retours s’il n’existe pas d’autres espaces dédiés.

Enfin, pour suivre de manière factuelle l’impact des évolutions de notre organisation, nous avons besoin d’indicateurs de succès. Ils doivent refléter la productivité de l’organisation mais aussi la qualité et l’impact du produit final.

Par exemple, dans le monde du développement de produits numériques, on mesure la performance de l’usine digitale, c’est-à-dire la capacité de réalisation des équipes. La vélocité, le temps de fabrication des incréments et le respect des engagements sont des moyens de la superviser.

Cependant, la performance ne garantit pas nécessairement le succès commercial. Il est donc important d’ajouter des indicateurs d’impact liés à ces incréments livrés, lesquels sont indéniablement liés aux objectifs commerciaux de l’entreprise.

A emporter

En somme, considérer l’organisation comme un produit nous permet d’adopter une démarche plus adaptée et centrée sur les utilisateurs pour mettre en œuvre et transformer notre organisation.

En suivant les principes clés du product management, nous sommes en mesure de construire une organisation flexible et réactive, capable de répondre aux besoins de nos parties prenantes, tout en poursuivant notre vision stratégique.

Une organisation dynamique et porteuse de sens contribue à la prospérité de nos entreprises. Une organisation apte à évoluer pour surmonter les obstacles qui se dressent, sera non seulement plus motivante pour ses collaborateurs, mais aussi plus compétitive sur le marché.

A lire aussi

Même si le concept n’est pas explicite, nous pouvons le voir abordé dans différents écrits comme “The Lean Startup” par Eric Ries ainsi que “Organize for Complexity: How to Get Life Back Into Work to Build the High-Performance Organization” par Niels Pflaeging traitant des organisations conçues pour s’adapter.